Deux étudiants d’Agro Sup découvrent le lombricompostage, une solution possible pour le traitement des déchets. À leur sortie d’école, ils prennent deux chemins différents : l’un, un « bifurqueur » — comme on appelle désormais ces enfants de la bourgeoisie qui choisissent un autre mode de vie pour tenter d’enrayer le réchauffement climatique — se lance dans une thèse sur les terres agricoles de son grand-père, vivant de peu, et souhaitant étudier la recolonisation des sols par les vers de terre.
L’autre, après quelques pérégrinations, s’associe à une héritière et crée une start-up qui cartonne, surfant sur le greenwashing au profit des grandes entreprises, à commencer par L’Oréal.
Le premier finit par voir son couple se briser, abandonne sa thèse, et devient l’un des leaders d’un mouvement écologiste insurrectionnel.
Le second se retrouve accusé de fraude lorsqu’il découvre que les chiffres de traitement des déchets étaient falsifiés. Ils se retrouvent tous deux dans une scène apocalyptique au Sénat, lorsque le mouvement du premier prend les armes et se fait mater dans le sang.
L’ensemble du livre reste assez crédible : la description de la start-up nation, prête à toutes les compromissions pour faire de l’argent, sonne juste. Mais la scène finale est incontestablement ratée… car trop irréaliste. Il est évident qu’une telle opération coordonnée sur tout le territoire n’a — heureusement — aucune chance de voir le jour. Cela sonne faux et vient gâcher le plaisir qu’offrait la lecture.
Autres défauts : le manque de profondeur psychologique des personnages, dont on ne devine que peu de choses, si ce n’est leur éco-anxiété et leur bonne volonté ; et la bisexualité peu crédible, presque éthérée, du second, qui n’apporte rien au récit et semble surtout être une touche de militantisme gratuite de la part de l’auteur.
Bref : quelques fulgurances, mais l’ensemble est gâché par l’imagination débridée de l’auteur, qu’il avait pourtant su mettre à profit avec beaucoup plus de réussite dans son conte philosophique (L’Enfer).