
Une brillante élève d’un lycée de campagne, plutôt jolie, intègre la plus prestigieuse des universités américaines. Assoiffée de connaissances, elle débarque dans un environnement où la superficialité est reine, la compétition sociale le sport principal, et les beuveries récurrentes le principal moyen de socialisation — le tout dans une ambiance « upper class » dont elle est totalement étrangère.
Elle rencontre un basketteur de haut niveau, mauvais élève mais plutôt sympathique, et se fait convoiter par le gratin du prestige social : les enfants de riches, membres d’une fraternité très fermée. Elle finit par se faire manipuler, perd sa virginité lors d’un gala, et sombre dans une dépression qui la met scolairement en danger.
Elle parvient à reprendre pied, notamment grâce à un ami qu’elle finira par renier, et on la retrouve à la fin du livre en couple avec le basketteur, auréolée de prestige.
Comment ne pas penser qu’elle a fini par renier ses valeurs, qu’elle a, elle aussi, été contaminée par l’esprit de jouissance et le culte des apparences qui caractérisent si bien cet environnement ?
Comme dans l’autre grande œuvre de Tom Wolfe, le livre est truculent, souvent drôle, et la description du système de castes informel qui règne dans ce type d’endroit sonne très juste. On ne peut que penser que l’Amérique est en pleine décadence, surtout lorsqu’on se rappelle ce que furent ses grandes universités au début du siècle : foyers de savoir, de rigueur intellectuelle et d’idéal.
Désormais, seul comptent l’argent, le luxe, le prestige — toute forme de valeur ou de transcendance est moquée ou tout simplement ignorée.
Le wokisme qui émerge sur ces campus semble presque sympathique en comparaison : au moins n’est-il pas teinté du même nihilisme consumériste.
J’ai été frappé par le regard de l’héroïne, capable de percevoir tous les signes de mépris (même si elle se fera piéger), et par sa tendance à céder facilement à la honte d’elle-même. J’ai aussi reconnu ce double mouvement : être révolté par l’ambiance et pourtant tenté d’y céder.
Reconnaissons toutefois que tout n’est pas noir dans ces universités : elles permettent aussi de briser bien des barrières intellectuelles que l’on s’impose soi-même — à condition de ne pas déroger à l’essentiel, et de garder ses valeurs. En bref : savoir faire le tri.